Toshkua, un documentaire très émouvant, en présence de son réalisateur Luc Bonleux et de Maria, protagoniste.

Il est des mots qui claquent comme un glas. « Toshkua », en langue pesh, signifie « disparaître ». Un verbe à la résonance tragique qui dépasse la simple absence pour embrasser un spectre plus large : la disparition d’un être cher, d’une culture, d’une langue, d’une terre sacrée où les esprits et la vie ne faisaient qu’un.

Dans son documentaire de 80 minutes, le réalisateur Ludovic Bonleux ne raconte pas une histoire de disparition, il en tisse les fils. Car l’effacement n’est jamais le fruit d’un seul facteur, mais d’un entrelacement insidieux où la pauvreté, la violence, la drogue et l’indifférence s’entrelacent pour distiller leur poison lent. « Toshkua » est le témoignage brut et poignant de ceux qui refusent l’oubli, de ceux qui résistent à la fatalité.

Deux figures émergent de cet entrelacs de douleur et de détermination : Francisco et Maria. Deux âmes, deux combats, un même cri face à la disparition.

D’abord, Francisco. Il vit dans la jungle de la Mosquitia, au Honduras, un territoire sauvage et menacé, un éden en péril où la modernité, la déforestation avancent tel un feu rampant, dévorant les traditions et les terres ancestrales. Francisco, gardien d’un monde en sursis, lutte contre la destruction de son territoire.

Et puis, il y a Maria. Maria, dont le visage est marqué par une décennie de douleur et d’attente. Son fils, Marco Antonio Amador Martinez, a quitté le Honduras pour chercher un avenir meilleur aux États-Unis. Il était chauffeur de bus, un homme de labeur, fuyant la corruption et la violence qui gangrènent son pays. Le 13 mars 2013, à 15h30, il donnait ses dernières nouvelles depuis une église de Tamaulipas, au Mexique. Depuis, plus rien.

Maria n’a pas cédé à la résignation. Trois fois, elle a parcouru les routes du Mexique avec la Caravane de Mères de Migrants Disparus. De la frontière guatémaltèque aux confins de l’espoir, elle sillonne un pays qui avale les âmes et efface les traces. Mais Maria ne se laisse pas effacer. Sa lutte, c’est celle de toutes ces femmes qui refusent que leurs fils, leurs filles, leurs sœurs deviennent des fantômes anonymes. Son regard, chargé d’amour et d’espérance, porte l’histoire de milliers d’autres, d’une humanité en sursis.

« Toshkua » n’est pas un documentaire qui se regarde passivement. Il se vit, il s’imprime dans la chair et l’esprit. Ludovic Bonleux ne se contente pas de filmer : il capte l’âme d’un monde qui se délite, il donne la parole à ceux que l’histoire s’apprête à oublier. Et dans la tempête des disparitions, il fait résonner la voix de ceux qui se battent encore pour exister.

Ciné Laudon remercie chaleureusement les intervenants :

LUDOVIC BONLEUX – Réalisateur du documentaire
MARIA MARTINEZ – Protagoniste
PAUL RODA – Médiateur du Festival Images Hispano-Américaines
CHRISTELLE REY : Professeure d’espagnol

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