La Fête du court-métrage rend honneur aux femmes
Mardi 25 mars 2025, Ciné Laudon participait à la Fête du court-métrage en proposant une séance gratuite pour toutes et tous. L’occasion de présenter une série de quatre court-métrages, dont le thème entrait en résonnance avec la journée internationale des droits de la femme célébrée quelques jours auparavant : Les Femmes par les Femmes ! La séance a permis d’explorer la place de la femme dans les années 1970-1980, au prisme de réalisatrices engagées. Ciné Laudon accueillait pour l’occasion l’autrice et professeure de philosophie Hélène Soumet, qui a notamment écrit Insoumises et conquérantes, Travesties pour changer le cours de l’Histoire (2021).
La séance a commencé avec la projection du documentaire Réponses de femmes (1975) d’Agnès Varda, dans lequel une dizaine de femmes répondent à la question « Qu’est-ce qu’une femme ? ». L’occasion d’explorer la vision des femmes sur leur genre, les diktats et représentations stéréotypées dans les publicités de l’époque ou encore le rapport à leur corps.
Le documentaire Rendez-vous romantiques (1972) de Michka Gorki a pris la suite en présentant des interviews d’hommes, filmés à leur insu, dans l’appartement de la réalisatrice. Invitant à boire un verre divers hommes l’ayant accostée, Michka Gorki expose ces différents échanges dans son lieu de vie papillonnant, où l’on découvre le profil d’hommes de tous milieux et de tous âges.
S’est enchaîné le documentaire Pionnières et dictionnaires du cinéma (1984), réalisé par un trio de femmes : Carole Roussopoulos, Ioana Wieder et Nicole Fernandez Ferrer. Ce film de sept minutes met en avant diverses réalisatrices de cinéma des années 1900 à 1960, tantôt mentionnées, tantôt oubliées des archives de dictionnaires de cinéma. Une invisibilisation frappante, à laquelle ces trois réalisatrices remédient en mettant en avant ces femmes qui ont, elles aussi, écrit l’histoire du cinéma.
La projection s’est clôturée par le documentaire expérimental Free, white and 21 (1980) qui met en avant le témoignage édifiant de la réalisatrice Howardena Pindell, femme noire victime de ce que l’on appelle aujourd’hui la misogynoir (forme de discrimination combinant misogynie et racisme). A la fois devant et derrière la caméra, elle met en lumière la difficulté à être reconnue comme un individu à part entière dans un monde où les discriminations raciale et sexiste s’infiltrent jusque dans les écoles primaires et les universités.
En seconde partie de soirée, relayant la thématique de la place de la femme dans les sociétés, Hélène Soumet s’est prêtée au jeu de questions sur son ouvrage Insoumises et conquérantes. Désormais Saint-Jorienne, auteure de 23 livres, dont de nombreux ayant pour objectif de rendre la philosophie accessible à tous, elle a également créé récemment avec son mari les Editions Brume du Lac, maison d’édition spécialisée dans des albums pour la jeunesse, sur le thème de l’écologie et du lac.
Pourquoi avoir écrit un livre sur le travestissement d’émancipation ? En préparant un livre sur les philosophes dans lequel elle avait inséré des paragraphes sur des femmes philosophes, Hélène Soumet s’est vu refuser par son éditeur ces références faites aux femmes, sous prétexte que cela n’allait intéresser personne. Les libraires eux-mêmes affirmaient qu’ils ne mettaient pas en avant les ouvrages affichant les sujets de féminisme. Hélène décide alors de se plonger dans l’histoire de femmes ayant dû se travestir en homme pour vivre leurs passions, et écrit en 2014 Les travesties de l’histoire : ce livre rencontre un grand succès médiatique, mais pas commercial malheureusement, son titre et sa couverture (imposés par l’éditeur) prêtant à confusion. Quelques années plus tard, l’ouvrage est réédité avec son titre actuel, et Insoumises et Conquérantes trouve finalement son lectorat.
Qu’est-ce que le travestissement d’émancipation ? A ne pas confondre avec le déguisement ni avec le travestissement de genre, le travestissement d’émancipation est une solution utilisée dans le passé (et encore aujourd’hui) par les femmes pour exercer un métier d’hommes, par exemple en revêtant « l’habit » symbole de masculinité. L’autrice rappelle que le port du pantalon pour les femmes était officiellement interdit en France jusque dans les années 60, et qu’il a fallu longtemps disposer d’une autorisation officielle de travestissement pour porter des habits d’homme (en témoigne le certificat délivré à Rosa Bonheur).
Quelques exemples de femmes travesties : Hélène Soumet a évoqué les destins de James Barry, haut gradé dans l’armée britannique ou encore de l’archéologue française Jeanne Dieulafois, … Autant d’exemples remarquables donnant au public l’envie de se plonger dans le livre Insoumises et conquérantes !
La séance s’est achevée par de nombreuses questions (posées également par les messieurs présents dans la salle) et des échanges conviviaux autour d’un verre de l’amitié.
Ciné Laudon remercie Hélène Soumet d’avoir conquis le public de cette soirée très animée.